Vous connaissez certainement des personnes qui se gargarisent de mots, qui s’écoutent parler, qui truffent leurs propos de références pseudo-techniques et philosophiques, qui citent de grands auteurs en pensant s’élever à leur niveau, qui semblent traiter de grands problèmes sociétaux, internationaux, cosmiques, bref, qui nous dépassent… C’est certainement à ce genre de personnes que pensait Henry Maret en écrivant ce bon mot (dans ses Pensées et Opinions) :
« Soyez clair et vous êtes perdu ! D’abord vous mécontenterez tous ceux qui ne sont pas de votre avis, puis vous exciterez d’autant plus à la riposte que personne ne vous admirera et que chacun pensera : « j’en dirais bien autant ». Tandis qu’un bon amphigouri, ah ! mon ami, un bon galimatias, cela est d’une beauté inimitable. Et allez donc découvrir ce qu’il y a dessous puisqu’il n’y a rien. Semez cela de quelques mots sonores, de quelques bonnes banalités, qui aient beaucoup servi, et que tout le monde reconnaîtra au passage, et vous m’en direz des nouvelles. »
Quelle mise en garde ! Une pensée trop claire et trop concrète vous perdra. Laissez les gens croire que vous dites des choses profondes, plutôt que leur permettre de naviguer sur l’océan du savoir. Qu’ils aient peur de se noyer, qu’ils ne s’aventurent pas trop loin dans votre verbiage… En retour, si vous tombez sur ce genre de specimens, écoutez-les plus attentivement. Cherchez à les comprendre, vraiment, sincèrement. Demandez-leur de précisez leur pensée. Questionnez-les. Poussez-les jusque dans leurs retranchements. Remettez en cause la largeur de leurs vues et la longueur de leur pénis. Moquez-vous d’eux. Giflez-les, au nom de l’humanité.