Préparer un discours

Je craque ! 13 bonnes raisons de laisser tomber PowerPoint

Arggggggh!!! Les présentations PowerPoint, je craaaquuue!!!

Une bonne résolution pour cette année ? Mettre PowerPoint au placard ! A moins de savoir parfaitement l’utiliser… Mais comme c’est trop peu souvent le cas, oublier les « slides » et réveiller l’orateur qui est en chacun de nous. Devant PowerPoint nous ne sommes plus de véritable orateurs, mais bien souvent de simples lecteurs. L’humain s’écrase face à la technologie, s’oublie devant le numérique, et les présentations sont toujours moins vivantes, chaque fois moins vibrantes

Pour faire vibrer son public, il faut vibrer soi-même ! Et oser se livrer tout entier, sans artifice, sans subterfuge, dans une parole directe, libre et authentique. Voici donc 13 raisons de mettre PowerPoint de côté cette année :

1 – Parce que tout le monde s’y attend. En effet, plus aucune réunion ne semble envisageable sans PowerPoint. Qui doit présenter un projet se doit de le faire à travers sa série de slides. Au début PowerPoint était une vraie nouveauté et permettait de faire preuve de créativité. Connecter sa clef usb, trouver le bon fichier, baisser les lumières et faire défiler : c’est devenu la routine. Si vous voulez marquer votre public, le surprendre : annoncez d’emblée que vous n’avez pas de PowerPoint (ou tout autre système nécessitant une projection) ! Quelqu’un qui se pointe sans support visuel, ça a le mérite d’intriguer : comment va-t-il s’y prendre ? Qu’a-t-il à raconter ? Venez… sans rien. Mais donnez-vous tout entier. Marquez votre différence, affirmez votre personnalité, soyez là où l’on ne vous attend pas.

2 – Parce qu’il y a toujours des problèmes de connexion, ou en tout cas très souvent. Bien que la plupart des salles de réunion sont équipées d’un système de projection, beaucoup d’autres ne le sont pas. Fallait-il amener son ordinateur ? Est-ce qu’il y a une rallonge ? Pourquoi ma clef usb ne fonctionne pas ? Fallait-il passer par une station blanche ? Pourquoi ce fichier ne s’ouvre pas, ne s’affiche pas, n’est pas pris en charge… ? Sans compter tous les bugs et coupures de courant qui pourront survenir inopinément.

3 – Parce qu’il faut plonger la salle dans le noir si tout le monde veut bien voir. Comme le point précédent, cela demande un contrôle efficient de son environnement : toutes les fenêtres peuvent-elles se fermer ? Ne fera-t-il pas trop chaud (si l’on est en été par exemple) ? Les volets ou rideaux sont-ils suffisamment opaques ? Malgré toutes ces précautions, il suffit qu’un petit rayon de lumière filtre au travers pour gêner l’affichage et la lecture du public, ce dernier ne manquant pas de se plaindre… Or, ce devrait être à l’orateur de s’adapter à son environnement, et non à l’environnement d’être modifié simplement pour se servir de PowerPoint.

4 – Parce que vous détournerez le regard du public. Tout d’abord, la mise en place du PowerPoint et de la salle nécessitera toute votre attention – alors que vous devriez accorder exclusivement votre attention à votre public : il est important d’établir un fort contact visuel avec le public dès les premières secondes d’une intervention. Ensuite, une fois le PowerPoint correctement lancé et la salle suffisamment plongée dans l’obscurité, ces éléments continueront de capter votre attention : vérifier que tout fonctionne bien, manipuler les commandes pour faire défiler les slides, regarder les slides… Dans l’idéal, il faut connaître sa présentation par cœur, un peu comme un présentateur météo et ne jamais tourner la tête vers les slides mais toujours maintenir le contact visuel avec le public !

5 – Parce que le public détournera son regard de vous. Et, à vrai dire, c’est peut-être ce que certains cherchent inconsciemment. En faisant du PowerPoint l’essentiel d’une présentation, le public se focalise sur les slides et ne nous dévisage plus. Le regard est capté par la lumière, la projection occupe la partie centrale du mur principale de la salle et on reste sur le côté, dans l’obscurité, un peu caché… Du coup on refuse le vrai rôle d’orateur qui nous incombe, alors qu’on devrait soi-même se mettre en scène.

6 – Parce qu’on lit toujours trop ses notes. Se passer complétement de notes écrites est la marque des orateurs de talent. A défaut de notes écrites sur du papier, la tentation est grande d’utiliser PowerPoint comme des notes, et de se reposer dessus slide après slide. Mais personne n’est dupe ! Et tout le monde voit bien que l’orateur lit ses slides, qu’il est incapable d’en décoller, qu’il avance à leur rythme et se permet peu de digressions voire aucune : il est prisonnier des slides, et n’offre pas à ses auditeurs la parole libre qu’ils attendent. J’ai déjà vu un professeur projeter un PowerPoint sur lequel son discours était intégralement rédigé, à la virgule près… même les (fausses) hésitations ! Le public a fini par en rire, mais pas dans le bon sens. PowerPoint a transformé les orateurs en lecteurs. Il faut réapprendre à se passer de toute note et de tout support, et simplement parler et se mettre soi-même en scène, occuper l’espace non par la projection d’images vidéos mais par la puissance de sa voix et les mouvements de son corps !

7 – Parce que le public attend de télécharger le PowerPoint. Si vous distribuez des documents pendant votre intervention, vous verrez que tout le monde va se concentrer dessus et commencer à les lire, à tourner les pages, et, bref, à écouter avec beaucoup moins d’attention ce que vous êtes en train de dire. Pour éviter cela, attendez la fin pour la distribution ! Mais si vous commencez d’emblée avec un PowerPoint présentant avec précision chacune de vos parties et sous-parties de votre exposé, la question va vite se poser : « On pourra prendre la copie sur clef usb ? » Du coup, le public relâche son attention, est plus distrait, moins impliqué, avec la certitude sereine qu’il pourra de toute façon tout récupérer à la fin sur clef usb, et prendre le temps une fois chez lui de revenir sur les points importants et regarder en détail ce qui mérite de l’être (ce qu’il ne fera d’ailleurs presque jamais…). En n’utilisant pas PowerPoint, vous obligez en quelque sorte le public à se concentrer sur que vous dites, vous favorisez une bien meilleure attention de sa part.

8 – Parce que les slides sont mal construits. Je parle d’expérience : à ce jour, j’ai assisté à – ou plutôt j’ai subi – un peu plus d’un millier de présentation PowerPoint (ce n’est pas tant que ça à vrai dire, ça fait environ 3 présentations par jour pendant un an…). Sur ce millier de présentations PowerPoint, seules DEUX ont vraiment retenu mon attention et ont également plu à l’ensemble du public. Toutes les autres étaient vraiment mal fichues et cumulaient toutes les erreurs classiques avec PowerPoint : slides surchargés d’informations, illisibles, schémas incompréhensibles, animations ringardes… Pour éviter un flop avec PowerPoint, autant ne pas utiliser du tout PowerPoint ! Ou prendre le temps de maîtriser les subtilités de cet art à part entière avec des artistes du genre, comme sur SimpleSlide par exemple ! Vous trouverez également de très bons conseils dans le bouquin de Garr Reynolds Présentation Zen et celui de Nancy Duart Slide:ologie.

9 – Parce que les slides formatent notre pensée. A vouloir faire rentrer toutes nos idées dans des petits slides bien organisés, on finit par en détruire une partie, et à remodeler ce qui reste. De la même manière que les plans-types au lycée et à l’université (en deux ou trois parties et tout autant de sous-parties) conditionnaient notre expression et notre réflexion, PowerPoint façonne un mode de pensée duquel nous finissons par être prisonniers. Certaines idées ne retiennent plus notre attention simplement parce que nous ne voyons pas comment les intégrer dans certains slides. PowerPoint fait des ravages, lire à ce sujet l’ouvrage de Franck Frommer : La pensée PowerPoint – Enquête sur ce logiciel qui rend stupide. Voir aussi Stop au PowerPoint ! Réapprenez à penser et à présenter de Nicolas Berreti.

10 – Parce qu’il n’y a plus aucune surprise. La succession des images, qui devrait être dynamique, devient souvent lassante et ennuyante. Ce qui caractérise les grands discours, c’est le pouvoir de l’orateur sur son public. C’est lui qui mène la danse. C’est lui qui fixe les repères, donne le ton, pose le rythme. Personne ne regarde sa montre et tout le monde est entraîné dans une sorte de distorsion du temps : un bon discours semble toujours plus court que ce qu’il a véritablement duré ! Comme un bon film ou une pièce de théâtre. Personne ne voit le temps passer. Tandis qu’avec PowerPoint, on peut voir le nombre de slides, et au combien nous en sommes. Le public lassé se met donc à décompter chaque slide, attendant simplement la fin, comme un écolier au regard hagard suivant fébrilement la trotteuse de l’horloge sur le mur de la classe…

11 – Parce que le public devient spectateur passif, alors qu’il devrait être auditeur actif et réactif. Pour toutes les raisons énumérées dans les points précédents, il est clair que le public (autant que l’orateur lui-même !) est beaucoup moins actif lors d’une présentation PowerPoint que lors d’un vrai discours, où l’orateur compose en fonction des réactions du public, qui ne se prive pas de réagir, d’applaudir, de rire ou de crier. Le véritable orateur prend ses libertés avec le texte, improvise, se « lâche », rend son exposé plus vivant, et le public vibre d’autant plus. Avec PowerPoint, l’orateur se cache derrière la projection des slides, il est écrasé, étouffé, et par contrecoup le public attend patiemment, passivement, pur récepteur d’un écran qui s’impose à lui sans aucune interactivité.

12 – Parce que le pouvoir des mots peut encore terrasser le choc des images ! Oui, votre parole peut avoir plus d’effet que toutes les photos que vous avez sélectionnées. Plutôt que les projeter, pourquoi ne pas s’efforcer de les décrire ? Trouver les mots pour amener tout un chacun à les imaginer ? L’impact en sera décuplé, car chacun fera de votre présentation une expérience personnelle, en y mettant du sien, en réveillant cette magie propre à l’esprit enfantin : celle de l’imagination. L’imagination est souvent plus forte que les images. L’imagination est une forme d’action, tandis qu’une image, une fois donnée, ne force qu’une forme d’acception.

13 – Parce que ce n’est pas vraiment utile. Au fond, si vous connaissez vraiment votre sujet, que vous êtes convaincu de l’intérêt d’en parler, que vous avez de bons exemples, de bonnes anecdotes et de bonnes idées, à quoi bon PowerPoint ? Réfléchissez à ce que PowerPoint peut vraiment apporter en plus, et à ce que vous pouvez vous-mêmes apporter sans PowerPoint. L’humain l’emporte encore sur la technologie, et votre force de conviction, votre énergie et l’expression de votre propre vie pulvérise tous les ordis, toutes les images et tous les effets numériques. Soyez vous-même, soyez vivant, refusez le conformisme PowerPoint et parlez librement : au fond, le public n’attend que ça ! Et il vous en sera reconnaissant.

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Technique de prise de parole en public : l’art des présentations conversationnelles

Faites des présentations conversationnelles ! Lorsque vous faites face au public et parlez dans le vague, vous avez statistiquement moitié moins de chances d’avoir l’attention complète de votre auditoire… La meilleure présentation possible est conversationnelle, celle pendant laquelle vous parlez à l’auditoire comme lors d’une conversation avec un ami. Voici nos conseils pour le faire efficacement :

1 – Parlez toujours à quelqu’un : ne parlez jamais à votre feuille, ne parlez jamais à votre écran, ne parlez jamais à la fenêtre. Regardez toujours en direction du public. Si vous avez besoin de votre ordinateur portable, disposez-le entre vous et votre auditoire, vous pourrez regarder vos slides en restant tourné vers le plus important, ceux qui vous écoutent.

2 – Parlez donc à une seule personne à la fois, quel que soit le nombre d’auditeurs, regardez-là dans les yeux pendant au moins 3 secondes en continu, sans être trop long pour ne pas gêner. Une idée = un regard : quand vous changez d’idée, changez de personne a regarder !

3 – Imaginez une conversation à deux avec cette personne et parlez-lui de cette façon. Un acquiescement de tête ou un sourire sont le signe que vous pouvez regarder quelqu’un d’autre. Au fond, que vous soyez face a une, dix, cent ou mille personnes, c’est toujours a une seule personne a la fois que vous vous adressez, pour faire sentir a chaque auditeur a quel point il compte, a quel point il est unique. Les techniques de eye contact vous aideront dans ce sens.

4 – Concluons par cette citation éloquente : « Ne parlez jamais à une foule. Pour ce faire, éliminez toute pensée que vous parlez à un groupe de personne. Ne parlez jamais à un auditoire. Ne parlez jamais à une classe. Ne parlez jamais à une congrégation. Ne parlez jamais à un club. Vous parlez à 1000 personnes…une à la fois. » !

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Savez-vous vraiment ce qu’il y a de plus important dans un discours ? La réponse peut TOUT changer…

Imaginez la situation : vous êtes sollicité par une association pour donner une conférence. Devant 50 à 100 personnes. Dans un mois. Le thème ? Vous avez carte blanche, tant que c’est en lien avec votre métier ou votre spécialité. Plutôt flatté, et toujours motivé, vous acceptez.

Comment vous y prenez-vous pour préparer cette intervention ?

Que la conférence ait lieu dans un mois, 10 jours ou 1 an, votre préparation doit commencer le plus tôt possible, dès que vous en avez été informé : il s’agit d’ouvrir et laisser couler à flot le « robinet à idées », pour accumuler un maximum d’informations, et commencer à les organiser progressivement.

Toutefois, la qualité de votre intervention ne dépendra pas de la quantité d’informations que vous y mettrez. Et quelles que soient ces informations, cela ne saurait de toute façon suffire pour préparer un discours de façon efficace. Encore faut-il répondre précisément à la question : pourquoi intervenir à l’oral ?

Réponse : « Pour transmettre un message à un public donné. »

Dans cette réponse, il y a deux choses très importantes : le message bien sûr, mais aussi et surtout le public

Tout part du public, et tout revient à lui. Le public est à considérer avec le plus grand intérêt, et le plus grand respect.

L’essentiel de votre préparation doit en effet se réaliser dans la perspective de toucher votre public. Et c’est donc par lui que tout doit commencer. Car c’est en fonction de lui qu’il faut adapter l’objectif et le message de votre intervention.

Ce qu’il y a de plus important dans un discours, c’est donc à qui il est destiné.

Une erreur fréquente consiste à se concentrer uniquement sur ce que l’on veut dire, ce que l’on pense bien ou nécessaire de dire, bref, à préparer le discours en fonction de soi, de ce qui nous plait ou nous semble intéressant, en oubliant complètement de penser à qui on est sensé s’adresser.

Or, un discours, c’est un peu comme le courrier. Vous pouvez rédiger la plus belle des lettres, si vous oubliez d’indiquer le destinataire sur l’enveloppe, ça ne servira strictement à rien. De même, si votre lettre commence par « Chère Madame », alors que vous l’envoyez à un vieil oncle, il est peu probable que votre message soit bien perçu.

Avant toute chose, pour guider votre préparation, vous devez donc clairement identifier votre public. Peu importe le discours en lui-même : ce qui compte, c’est à qui vous devez l’adresser. Et pour vous en convaincre, je vous propose de faire une petite expérience :

Pensez par exemple à une intervention, que vous avez déjà donnée, ou que vous pourriez faire, quel que soit le sujet. Envisagez maintenant d’intervenir sur ce même sujet face à différents publics successifs :

  • Face à vos amis ;
  • Face à votre famille ;
  • Face à vos collègues de travail ;
  • Face à des académiciens ;
  • Face à des parlementaires, ou des responsables politiques ;
  • Face à des scientifiques ;
  • Face à une foule d’ouvriers ;
  • Dans une classe de lycéens ;
  • Devant un parterre d’agriculteurs ;
  • Lors d’une soirée dans le cadre d’une croisière…

Vous voyez où je veux en venir ? Le type de public auquel nous nous adressons conditionne notre message et notre objectif. Nous seulement nous ne nous exprimerons pas de la même façon, nous n’évoquerons peut-être pas les mêmes informations, mais, surtout, nos interventions n’auront pas toujours le même but.

L’objectif d’une intervention peut être de : divertir, informer, convaincre, appeler à l’action

Face à un public professionnel ou spécialisé (congrès, colloques, conventions…), on cherchera plutôt à informer. Face à un public généraliste, à convaincre ou appeler à l’action. Face à un public amical ou familial, à divertir. On distinguera encore entre public adulte, public enfant et « tout public », etc.

Et naturellement, en fonction du public et de l’objectif, le message sera très différent, tant du point de vue du contenu que de sa forme même (vocabulaire employé, références citées, exemples utilisés…).

Si vous êtes invité à une conférence ou si vous avez une intervention à faire, quel que soit le contexte, prenez toujours soin de vous renseigner sur votre public avant même de vous lancer dans la rédaction du discours :

Quel profil ? Moyenne d’âge ? Spécialisé ou pas ? Si oui, dans quel(s) domaine(s) ? De quelles informations dispose-t-il déjà ? Quelles sont les tendances générales (religieuses, politiques, philosophiques…) ? Et toute autre question qui vous semblera importante, selon votre sujet.

Ce n’est qu’après avoir identifié votre public que pourrez fixer votre objectif et, en fonction, élaborer votre message.

Pour vous souvenir de l’ordre de ces étapes dans vos préparations, retenez ce petit mot : « POM », trois lettres pour Public-Objectif-Message !

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Marquez les esprits grâce à la technique de la photo mentale

Je l’ai déjà dit plusieurs fois sur ce site, et je le répète à chaque fois que j’anime un séminaire de formation en communication :

Quel que soit le sujet dont vous devez parler, appuyez-vous sur du concret !

C’est un principe fondamental de la rhétorique et la base même du storytelling : si vous voulez captiver votre public, capter l’attention d’un interlocuteur, vous devez utiliser un langage imagé. Notre cerveau ne stocke pas les mots, mais les images qui y sont associées. Évitez donc les idées trop abstraites, et parlez plutôt de choses réelles, physiques, matérielles, « palpables »…

Je vais vous révéler une technique très efficace pour transformer vos idées abstraites en choses concrètes. Mais tout d’abord, pour bien montrer l’impact d’un langage imagé, voici un petit exercice que je fait souvent faire en formation. J’invite trois volontaires à me rejoindre sur scène, et je leur donne à chacun une consigne particulière :

  • Je demande au premier de nous parler d’un article qu’il a lu dans une revue ;
  • Au deuxième, de nous parler de son livre préféré ;
  • Au troisième, de parler d’une publicité récemment vue à la télé.

Chacun a 1 à 2 minutes pour s’exprimer, selon son inspiration. Puis les autres participants sont invités à voter pour l’intervention qui les a le plus marqués… Vous avez une petite idée du résultat ?

C’est quasiment la même chose à chaque fois. Celui qui parle de l’article se place d’emblée à un certain niveau d’abstraction et perd donc assez vite l’attention du public. En effet, les articles d’un grand nombre de revues traitent généralement d’idées abstraites, philosophiques ou politiques (essayez de transmettre un concept de « justice » sans donner aucun exemple, vous comprendrez mieux la difficulté).

Les livres qui nous plaisent, par contre, sont souvent des romans faisant appel à notre imagination (science fiction, polard, aventure…). Mais les grandes descriptions littéraires sont difficiles à retranscrire à l’oral de façon spontanée. Celui qui parle de son livre de chevet capte donc mieux l’attention du public, mais pas autant qu’il le pourrait…

Quant à la pub tv, c’est toujours elle qui a le plus de succès ! Car celui qui en parle peut décrire des images qu’il connait bien : il les a réellement vues, et se contente de dérouler le film dans sa tête. Il utilise alors des mots qui permettent au public de visualiser son message.

Voici donc un secret pour faire des interventions plus percutantes, capter l’attention et marquer les esprits :

Remplacez l’abstrait par le concret. Associez à chaque concept ou idée une image qui parle d’elle-même. Même les concepts les plus abstraits peuvent être matérialisés ou incarnés. C’est pourquoi les hommes ont créé les symboles, les emblèmes…

On retient plus facilement les images, que les mots qui y sont associés…

Et voici justement ma technique pour transformer facilement chaque abstraction en chose concrète : la technique de la photo mentale.

Choisissez un mot, quel qu’il soit, et essayez de le « prendre en photo ». Si le mot est « table », visualisez mentalement une table et appliquez-vous à la décrire dans les moindres détails. S’agit-il d’une table en bois, en plastique, en métal ? Qu’y a-t-il dessus ? De quelle couleur est la nappe ? Jouez avec cette image mentale comme avec un appareil photo : faites un zoom, dézoomez, mettez le flash ou passez en mode paysage, etc.

A vrai dire, à l’évocation de certains mots, tout le monde fait une photo en visualisant aussitôt. Si je vous dis « diamant », vous pouvez clairement voir apparaître dans votre esprit l’image d’un bijou, d’une pierre précieuse… Mais que se passe-t-il pour d’autres mots plus abstraits (tels que le mot « justice » évoqué plus haut) ?

Comment prendre en photo des mots tels que « bonheur », « richesse », « douleur », « vie », « éternité » ? La technique consiste précisément à les remplacer par des choses que vous pouvez photographier : objets, personnes, animaux, lieux ou monuments… Et n’ayez pas peur des clichés ! Exemples : un coffre rempli de pièces d’or pour la richesse, des visages d’enfants heureux pour le bonheur, la main fripée d’un bébé pour la vie

Si vous devez intervenir sur un sujet, notez sur une feuille tous les mots qui vous viennent à l’esprit (en rapport avec le sujet) puis faites une « photo mentale » pour chacun. Lorsque vous aborderez le sujet, visualisez ces photos et décrivez-les :
« Imaginez un nouveau-né dans son landau, si fragile et pourtant si confiant, apaisé, et souriant… »
« Imaginez une pile de dix lingots d’or de plusieurs kilos chacun, brillant de mille feux comme tout autant de petits soleils… »

Détaillez la description, faites des comparaisons. Cela donnera immédiatement plus de sens à vos paroles, plus de corps, vous capterez mieux l’attention de vos interlocuteurs et ils retiendront plus facilement ce que vous avez voulu leur dire.

Si vous devez défendre une idée, promouvoir un projet ou vendre un produit, allez plus loin et imaginez carrément un clip publicitaire en entier. Non seulement vous aurez les images, mais en plus vous les assemblerez de manière à construire un petit scénario – et cela captivera d’autant plus votre public qu’il voudra savoir la fin de l’histoire (un autre principe du storytelling).

En pratiquant régulièrement cette technique de la photo mentale, vous développerez votre imagination, vous améliorerez votre communication et augmenterez votre pouvoir de persuasion. Vous rendrez vos interventions plus vivantes et on se souviendra longtemps de vous !

Et maintenant, un petit exercice : quelles sont vos photos mentales pour représenter… L’éternité ? L’espoir ? La force ? La beauté ?

C.C. Crédits photo : Parker Knight

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O-BA-MA ou la magie du rythme ternaire

Le chiffre 3 est un chiffre magique… Toutes les formules marquantes respectent la règle de trois. Pensez aux slogans, aux devises : « Liberté Egalité Fraternité » ! « Du pain, du vin, du boursin » ! « Veni, Vidi, Vici » (paroles célèbres de César : je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu) !

Pensez également aux noms de marques célèbres : Oréo, Nutella, Activia… Dans l’alimentaire ou dans d’autres domaines, les marques les plus connues ont trois syllabes à chaque fois. Regardez les logos : la plupart ont trois couleurs, ou sont composés à partir de trois éléments graphiques.

Le rythme ternaire résonne en nous d’une façon toute particulière. L’adjectif « ternaire » signifie simplement que ce dont on parle est composé de trois éléments, de trois unités. En musique, une mesure ou un rythme ternaire désigne un rythme à trois temps et correspond plus globalement à tous les rythmes basés sur des multiples de 3 (3, 6, 9). Le rythme ternaire est très souvent pour ne pas dire quasiment tout le temps utilisé dans le Blues ou dans le Jazz…

La plupart des chansons et comptines de notre enfance étaient basées sur ce rythme : « 1, 2, 3, nous irons au bois, 4, 5, 6, cueillir des cerises… » Le rythme ternaire a donc une dimension mélodique. Un nom ou un slogan basé sur la règle de trois à quelque chose de « chantant ». En cela il est bien mieux retenu, et pénètre profondément dans l’esprit du public.

C’est aussi un repère structurant. Vous vous souvenez de nos leçons de géométrie quand nous étions petits ? Il faut au moins trois points pour déterminer un plan fixe. Imaginez une table : elle tient généralement sur quatre pieds. Vous pouvez en enlever un, elle tiendra encore très bien. Mais s’il n’en reste plus que deux, elle tombera d’un côté ou de l’autre. Et un seul, elle est totalement instable.

Dans un discours, c’est la même chose. Il faut au moins trois arguments ou « idées-force » pour convaincre efficacement. Un ou deux, c’est trop peu. Plus de cinq, et c’est trop – c’est même contre-productif, car en bombardant le public d’informations, celui-ci risque de saturer et, au final, ne rien retenir du tout…

Tous les grands orateurs maîtrisent la règle de trois. L’immense majorité des présentations de Steve Jobs, par exemple, sont structurées en trois temps. Obama applique cette règle à la perfection dans nombre de ses discours, en annonçant successivement trois propositions avant de les développer. Son fameux slogan lors de sa campagne de 2008 était construit sur ce principe : « YES-WE-CAN » ! Son nom même se divise en trois syllabes claires et distinctes, comme une marque à succès, O-BA-MA !

Pour vos exposés, préférez un plan en trois parties. Si vous voulez faire des listes, faites des listes de trois points. Pour raconter une histoire, organisez-la en trois moments clefs : situation initiale – intrigue – dénouement !

L’auteur londonien David Crystal, spécialiste du langage, explique bien le principe et l’usage de cette fameuse « règle de trois » dans cet extrait du documentaire Le Pouvoir des mots, (diffusé le 29 mars 2012 sur TV5) que je vous invite à visionner ci-dessous :

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Les quatre phases d’un discours éloquent selon Cicéron

Selon Cicéron, un bon discours s’articule en quatre grandes parties : l’exordium (introduction), la narratio (exposition des faits), la confirmatio (présentation des arguments) et la peroratio (conclusion).

Ces différentes parties font à leur tour l’objet de nouvelles divisions. La confirmatio, par exemple, se décompose en propositio (définition du point à débattre), l’argumentatio (déroulement de l’argumentation logique et développement des raisons probantes), la refutatio (où l’on réfute les arguments de l’adversaire), l’altercatio (où l’on provoque par une série de questions rhétoriques), l’amplificatio (où l’on cherche à élever le débat), et la disgressio (considérations annexes par rapport au point du débat).

Tout au long du discours et de chacune de ses parties et sous-parties, l’orateur éloquent doit également veiller à trouver le bon style oratoire, tout en joignant le geste à la parole.

Cette façon de décomposer le discours en parties clairement identifiées a évidemment un grand avantage méthodologique, en fournissant ainsi à l’orateur un canevas à respecter pour produire plus facilement ses allocutions. Mais le risque est aussi de limiter l’orateur dans sa créativité, le contraindre dans sa façon de penser, et, en révélant un même schéma pour toutes ses argumentations, amoindrir l’effet de celles-ci aux yeux de ceux qui l’auront trop nettement identifié…

Nous ne nous attacherons donc pas trop à ce découpage du discours, et prenons-le simplement ici comme un exemple de « l’obsession taxinomique » qui semble animer les grands théoriciens de la rhétorique… L’orateur moderne trouvera toujours un intérêt à se tourner vers la tradition, ne serait-ce que pour sa culture culture générale, mais il gagnera tout autant à chercher à les combiner avec de nouvelles inspirations en explorant des modes de communication plus contemporains, comme le storytelling.

Image en illustration de cet article : Cicéron dénonçant Catilina (CC Perkins, Bridgeman Art Library).

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