Sur la photo en illustration de cet article : la scientifique Jill Bolte Taylor prend dans ses mains un véritable cerveau humain lors de son fameux TED talk sur la neuroanatomie…
On retient plus facilement les images, que les mots qui y sont associés. D’où l’importance des illustrations, des images, des schémas, des dessins. Vous connaissez le dicton : un petit dessin vaut mieux qu’un long discours… Cela dit Il y a une différence entre image et schéma. L’image peut être métaphorique, symbolique, et ne pas représenter directement l’idée que l’on présente, tandis que le schéma doit être représentatif. Le schéma a d’abord une fonction pédagogique. Il permet d’illustrer un propos, d’expliquer une idée complexe. Il permet de rendre l’information plus facile à comprendre et à mémoriser. L’image symbolique ou métaphorique vise quant à elle à associer l’idée à un sentiment ou une émotion particulière.
Il faut aussi distinguer le pouvoir de l’objet de celui d’un dessin : le schéma a une visée explicative et reste sujet à interprétation, tandis que l’objet apparaît comme une véritable preuve matérielle de ce que l’on avance. Le schéma rend visuel quelque chose d’abstrait. A l’inverse, l’objet nous rattache directement au réel, au concret. C’est ainsi que Steve Jobs utilisait souvent le pouvoir de l’objet lors de ses présentations, et c’est précisément ce qui les rendait si spectaculaire ! Attention cependant à ne pas tomber dans l’excés, en utilisant à tout prix un objet au risque que celui finisse par sembler quelque peu décalé par rapport au discours… Comme Schwarzenneger et son balai lors de sa campagne en 2003…
Dans le cas du Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou lors de son discours à l’ONU le 27 septembre 2012, c’est moins le contenu du schéma que la représentation de la « bombe » qui a fait parler. C’est d’abord par l’utilisation d’un symbole, celui d’une bombe sur le point d’exploser, qu’il vise à alerter. Le côté « cartoon » a eu deux effets : c’est la raison d’un véritable buzz sur internet, il y gagne une large publicité – mais aussi le risque d’être décrédibilisé, par les détournements dont il a justement fait l’objet.
Cependant, malgré le décalage entre ce dessin amusant de bombe et la gravité du propos, le fait de se saisir d’un support visuel lui permet d’appuyer concrétement son discours. Il ne se contente pas de répéter plusieurs fois « ligne rouge » : « Il n’y a qu’une seule manière d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique, et c’est en fixant une ligne rouge, claire… » puis « Face à une ligne rouge claire, l’Iran cédera… », etc. En la dessinant lui-même, il la rend ainsi lui-même claire, car visible. Il rend concrètes la volonté et la possibilité d’agir.
Dans le cas de Nétanyahou, il y a une congruence sémiologique très intéressante que l’on peut donc formuler ainsi : le seul que l’orateur se saisisse d’un objet, ou qu’il trace lui-même les traits d’un schéma, permet de matérialiser non seulement son propos mais aussi sa parole elle-même. L’orateur doit être en mesure de produire ce signe visuel complémentaire à son expression orale. Il ne doit pas se contenter de simplement diffuser ou projeter une image ou une vidéo sur un écran, mais bien la « créer » lui-même ou montrer qu’il peut la saisir de ses mains (saisir l’objet en tant que signe). Par défaut, si l’orateur est limité à diffuser une image ou une vidéo, il peut être pertinent que ce soit lui qui apparaisse sur la photo ou dans le clip, ce qui donnera au public le sentiment d’un passage évident de l’image à la réalité.