« Pas question de se demander s’il faut faire de la philosophie ou non. Nous faisons de la philosophie car c’est obligatoire. C’est fatal. Notre conscience se pose des questions et il faut essayer de les résoudre. La philosophie est une chose obligatoire. »
Cette citation percutante est de Witold Gombrowicz, tirée de son Cours de philosophie en six heures un quart (paru en 1969). Le « quart » est là pour rappeler la fin brutale et arbitraire de son cours et de sa vie, qui ne pouvait respecter une heure « ronde »… Il était malade et alité quand l’un de ses amis le pria de lui donner des cours, ce qu’il fit donc jusqu’à sa mort, qui le prit par surprise.
Nous ne savons jamais quand notre cerveau s’éteindra. Pour tous ceux qui continueront de fonctionner après l’arrêt du nôtre, nous nous devons de le faire fonctionner au maximum pour tenter de résoudre les problèmes persistants du monde et de l’humanité. Nous n’avons pas le choix.
Notre cerveau fonctionne malgré nous. Il tourne constamment à plein régime. Nous pouvons chercher à lui échapper par le divertissement, par l’évasion alcoolisée, par la culture de la bêtise (en se gavant d’émissions télévisées du style Arthur ou Hanouna, en se contentant de lire des magazines féminins bourrés de publicités…) mais il finit toujours par nous rattraper. Il nous confronte à tous les mystères de la vie, à tous les paradoxes de l’existence. Pourquoi sommes-nous là ? Qui sommes-nous ? Que pouvons-nous faire ? Que nous est-il permis d’espérer ? Comment nous organiser au mieux pour y parvenir ?
Même le plus abruti des hommes ressent au plus profond de lui l’urgence de ces questions, quand bien même il s’avère incapable de les formuler, ni de verbaliser la moindre esquisse de réponse. Le désir, la frustration, la terreur, la peur, la crainte, l’inconfort de la pauvreté ou de la précarité sont tout autant d’émotions qui nous ramènent constamment à la nature misérable de l’être humain. Tant que nous n’éprouvons pas un authentique bonheur prolongé, les questions nous assaillent et nous obsèdent. Parce que nous nous accrochons malgré nous à des réponses, généralement fausses ou incomplètes (fournies par les grandes idéologies, par les discours mythiques ou les légendes, par les religions, par la politique, etc.), ce désir de réponse, cette tentative de réponse, c’est déjà cela la philosophie. D’une certaine façon nous philosophons presque malgré nous. Nous sommes tous philosophe, quel que soit notre âge, quel que soit notre degré d’intelligence.
Cependant, ce n’est pas parce que nous sommes tous philosophe que toutes les philosophies se valent. Pour les esprits prêts à se consacrer à un minimum d’efforts intellectuels, il convient d’étudier différentes idées, les disséquer, les soupeser, les comparer, les confronter, et avancer progressivement. La lecture des grands philosophes offre bien sûr le guide le plus évident, qui permet d’aller le plus loin – le plus haut dans la pensée.
Cela passe généralement par la lecture, beaucoup de lecture. Les grands auteurs comme Kant, ou ses vulgarisateurs comme Luc Ferry, à vous de trouver votre point d’entrée dans le monde merveilleux de la philosophie. Pas besoin de transporter une tonne de livres, un livre à la fois c’est déjà bien suffisant, et cela peut déjà vous occuper plusieurs semaines, de longs mois ou même une année entière : la philosophie se lit et se relit, elle ne se consomme pas comme un roman, on avance très progressivement, très doucement, jusqu’au « déclic » qui nous fait soudainement franchir un seuil et nous permet de voir le monde d’un nouvel œil.
Par ailleurs, la philosophie ne se lit pas que dans les livres : elle se lit aussi sur tablette, sur Kindle, sur smartphone… Elle se pratique au quotidien par la réflexion personnelle, et la discussion avec les gens que vous côtoyez ou rencontrer. Philosophez, philosophez ! C’est obligatoire !