Abordons dans cet article le discours « classique », c’est-a-dire tel qu’il se structure en rhétorique classique. Ce que nous allons voir ici en est une version simplifiée, mais diablement efficace. Sur ce blog, nous avons déjà proposé différents plans de discours, mais aucun de ceux-ci ne suivait la structure traditionnelle du discours. Aujourd’hui, nous allons donc nous rapprocher du « discours classique » (tel que présenté dans les traités de rhétorique classique) et vous en donner une version simplifiée, facile à mettre en oeuvre dès vos prochaines interventions :
La structure simplifiée du discours classique
Le discours classique simplifié suit la logique suivante :
1. votre personnalité (ce qu’on appelle ethos en rhétorique)
2. votre logique (le logos)
3. leur émotion (le pathos)
Lire (ou relire) l’article : Les 3 piliers de la rhétorique expliqués par ma fille
Adaptez-vous à votre auditoire
Au début du discours, créez-vous le personnage que vous voulez présenter à votre auditoire. Gentil garçon, grand patron, comédien ou encore proche concerné. La personnalité persuade mieux que la logique parce que l’on est davantage d’accord avec quelqu’un en qui l’on a confiance qu’en une personne qui nous présente une logique sans faille.
Le principal objectif de l’introduction n’est ici pas de donner un avis ou d’exposer vos idées, mais de vous donner une image qui sera appréciée et qui mettra en confiance l’auditoire. Cela passe par le choix des mots (champs lexical), des vêtements (comme s’habille le spectateur moyen ?) et des attitudes (langage corporel). Faites en sorte qu’ils croient que vous partagez leurs valeurs.
Exposez vos idées
Une fois la première partie réussie, il est temps d’avancer. Une fois arrivé à la seconde étape -le milieu- vous êtes à l’endroit pour placer la logique. Votre principale idée (et les petites, s’il y a lieu) arrive maintenant. Enoncez la brièvement et mettez un lien avec les valeurs de l’auditoire. Puis développez-les. Le lien que vous aurez créé avec les valeurs de l’auditoire appuiera les justifications que vous donnerez à vos conclusions. Par exemple énoncez d’abord votre idée, puis donnez-lui des justifications logiques, et enfin donnez quelques exemples pour illustration.
Imaginez que vous vous adressez à des lycéens dont les valeurs sont, c’est connu, toutes des variations de carpe diem. Comment allez-vous faire le lien avec vos propres valeurs ? A quoi réagissent-ils ? Leur dire de saisir l’occasion car la vie est courte ? Tous les lycéens pensent que la jeunesse dure toujours et qu’ils sont immortels. Cet argument aura l’effet d’un « permission de 23h », vous croyez leur donner la permission jusqu’à 23h, ils pensent que vous leur ôtez la liberté de rentrer plus tard.
Revenons à leurs valeurs. A quoi un adolescent réagit-il ? Une bonne idée est de faire appel à leur impatience naturelle, à leur indépendance de leurs familles et à la liberté loin des restrictions parentales. Ne leurs dites pas de saisir l’occasion car la vie est courte. Dites leur de saisir l’occasion car cette occasion est la leur, car c’est leur monde, qu’ils ont le droit de décider par eux-même. L’indépendance et l’égalité sont les valeurs des adolescents. Prononcez alors vos mots avec conviction, de la bonne manière, et votre logique ne sortira pas par l’autre oreille.
Mettez de l’émotion pour le passage à l’acte
Enfin, terminez avec de l’émotion, petite émotion pour un petit groupe, émotion moyenne pour un groupe moyen, grosse émotion pour… vous avez compris. Efforcez-vous de terminer le discours plutôt qu’à voix basse, finir en beauté est un challenge que tout discours doit relever.
Pourquoi l’émotion est-elle nécessaire ? L’émotion joue un rôle capital dans le passage à l’acte. Grâce à elles, l’auditoire aura envie de penser comme vous. Bien évidemment il va falloir choisir les émotions qui vont avec le reste du discours. Certaines émotions marchent mieux que d’autres, c’est le cas de la joie, de l’amour, de l’estime, de la compassion, du sentiment d’appartenance à un groupe ou de la peur.
Voici un exemple d’utilisation du sentiment d’appartenance à un groupe :
« Qui possède le monde aujourd’hui ? Vous. »
« Qui peux changer le monde aujourd’hui ? Vous. »
« Qui a le pouvoir ? Je vous le demande, QUI A LE POUVOIR ? VOUS, VOUS AVEZ LE POUVOIR »
Voici un exemple d’utilisation du sentiment de la colère :
« Le président dit de nous que nous sommes des fainéants bons à rien. Nous faisons des études longues, nous nous tuons pendant des stages non rémunérés, nous faisons tout pour trouver le moindre emploi. Et aujourd’hui, il nous pisse dessus en créant le CPE qui veut nous mettre à la rue sans préavis par nos futurs employeurs ? »
Trois étapes pour faire un discours convaincant… C’est exactement ce qu’il m’aurait fallu, dans ma jeunesse… J’espère que cela vous sera utile, surtout si vous êtes étudiant et que vous préparez un exposé… ou un concours d’éloquence !