Regardez la vidéo ci-dessus : un coach sportif motive son équipe !
La vidéo est sobrement intitulée « The greatest speech ever » par celui qui l’a postée. Le meilleur speech du monde ? Qu’en pensez-vous ? Même sans comprendre l’anglais, on peut se laisser porter par le rythme et apprécier.
Il faut en effet reconnaître à ce coach une certaine forme d’éloquence, de l’aisance et une véritable énergie dans son body langage, une force dans son eye contact et ses intonations…
De mon point de vue, le défaut majeur de ce speech vient cependant…de ce qui ne vient pas du speech en lui-même, mais s’y superpose maladroitement… Je veux parler de la musique ! Beaucoup trop présente, et peu originale, fréquemment utilisée dans ce genre de situation pour amplifier volontairement la vibration et l’émotion (il s’agit de la bande son du film Le dernier des Mohicans).
Un bon orateur ne devrait pas avoir pas besoin de ce subterfuge pour capter son public, la musique doit venir de sa voix elle-même, les vibrations de son corps tout entier. Le rythme peut être aléatoire, le phrasé moins construit, mais l’intervention d’autant plus vraie et directe.
Ne cherchez pas à vous « cacher » derrière une musique, ni même un support visuel, un costume ou un décor : parler en public, c’est un peu se mettre à nu face aux autres. Il faut assumer cette « nudité », s’habiller de sa plus belle voix et de gestes habiles. Il faut travailler l’aisance de son expression corporelle, la façon de mouvoir et de bouger son corps avant de réfléchir à la façon de le vêtir. Il faut s’efforcer de posséder son sujet intérieurement, intimement, plutôt que vouloir à tout prix le présenter sur des supports externes, par exemple sous forme de PowerPoint.
L’art de parole, c’est cette capacité à transmettre une vision, à construire un monde simplement grâce au pouvoir des mots, c’est une façon de stimuler l’imagination du public avec le moins d’artifice possible. L’orateur n’a besoin d’aucun autre instrument que lui-même, son corps, sa voix et son esprit ; et c’est là en réalité un orchestre tout entier qu’il lui faut diriger, et qui peut emplir les coeurs et faire tressaillir les âmes bien plus que n’importe quel spectacle !
Toutefois l’utilisation d’un fond sonore est un excellent moyen de s’entraîner, voici par exemple 4 usages possibles :
1 – Adapter la durée de l’intervention à la durée d’un morceau, en vue de respecter un timing très précis. Dans sa version pro, c’est par exemple le fameux compte à rebours sonore que l’on entend lors d’un flash info à la radio. Choisissez un jingle, une musique courte (1 minute), écoutez-le attentivement, puis réécoutez-le en réfléchissant au placement de vos paroles par-dessus. Vous devez suffisamment bien connaître cette musique pour vous caler sur le rythme et anticiper la phase finale, indiquant le moment de conclure. Lorsque la musique s’arrête, vous savez que vous devez impérativement conclure par une dernière et ultime phrase.
2 – Se calquer sur le rythme d’un morceau particulier, pour les crescendo et decrescendo, phases d’accélération du débit et ralentissement… Choisissez un morceau qui correspond à l’état d’esprit que vous voulez transmettre lors de votre intervention (plutôt rock, plutôt mélancolique…). La durée doit elle aussi coïncider. Puis travaillez votre discours en vous basant sur le rythme et les phases musicales de ce morceau : parlez plus vite quand la musique accélère, plus fort quand le son augmente, ralentissez et parlez plus doucement sur les passages plus calmes… Une excellente façon de travailler les modulations (voix grave/aiguë, rythme lent/rapide) et les variations (volume faible/fort) vocales.
3 – S’entraîner à rester concentré sur ce que l’on a à dire malgré les perturbations sonores (typiques lorsqu’on intervient dans un bar ou autres lieux bruyants). L’idéal dans ce cas est d’enclencher plusieurs sources sonores : allumez la radio, la télé, et l’ordinateur en même temps..!! Vous pouvez même mettre un casque sur vos oreilles, pour augmenter la confusion. Variez le volume et les sources afin de vous sensibiliser progressivement à ces différentes perturbations, et habituez-vous à rester concentré dans ce brouhaha. Ainsi, lorsque vous devrez intervenir dans un lieu bruyant comme un café, vous serez d’autant moins troublé ou déstabilisé !
4 – Enfin, proche de l’exercice précédent, mettre la musique très fort, monter le volume au maximum (tout en respectant vos oreilles bien sûr…et celles de vos voisins…) pour s’entraîner à parler par-dessus et travailler ainsi la force et la portée de la voix. Ce dernier exercice correspond à celui que pratiquait Démosthène en 300 av. JC, en parlant face à la mer, jouant de sa voix face au grondement des vagues…