L’éloquence, l’art de parler avec aisance, a traversé les âges et les civilisations, subissant de nombreuses transformations tout en conservant son essence. Les médias sont apparus et se sont développés, depuis la radio jusqu’aux hologrammes et la réalité virtuelle en passant par internet et les réseaux sociaux… Mais les objectifs sont restés les mêmes, et la capacité à persuader repose toujours sur l’habileté de celui qui s’exprime, son aisance et sa facilité à gagner la confiance de son public ou de ses interlocuteurs. Découvrons ensemble les différentes étapes qui ont marqué l’évolution de l’éloquence, depuis la Grèce antique jusqu’à nos jours.
I. L’éloquence dans la Grèce antique
L’éloquence en tant qu’art
C’est à Corax que l’on doit le premier manuel de rhétorique connu à ce jour. Dans la Grèce antique, l’éloquence était considérée comme un art à part entière, une compétence précieuse pour les citoyens. Elle permettait de convaincre, de séduire et de rallier les foules à une cause. Les orateurs étaient des personnages clés de la vie politique et sociale. C’est ce qui amena Démosthène à devenir l’un des plus grands orateurs de tous les temps…
Les sophistes et la rhétorique
Les sophistes furent les premiers à enseigner l’éloquence en tant que discipline. Ils développent la rhétorique en tant qu’ensemble de techniques permettant de convaincre et de persuader. Parmi les figures célèbres de cette époque, on retrouve Gorgias, Protagoras et Isocrate.
Platon et Aristote
Platon et Aristote ont également contribué au développement de l’éloquence. Platon, dans ses dialogues, met en scène des personnages qui débattent et argumentent. Aristote, quant à lui, a écrit un ouvrage fondamental sur la rhétorique, dans lequel il expose les bases de l’art oratoire et établit un lien entre l’éloquence et la philosophie.
II. L’éloquence romaine
L’influence grecque
L’éloquence a continué de se développer dans la Rome antique, où elle fut largement influencée par la culture grecque. Les Romains ont adapté les techniques rhétoriques grecques à leur propre contexte, donnant naissance à une tradition oratoire spécifique.
Les grands orateurs romains
Parmi les orateurs les plus célèbres de l’époque romaine, on compte Cicéron et Sénèque. Cicéron a écrit plusieurs traités sur l’éloquence, dont le célèbre De Oratore, dans lequel il décrit les qualités requises pour être un bon orateur. Il aborde également les différents styles oratoires et la manière de les utiliser successivement. Sénèque, pour sa part, a enseigné la rhétorique à Néron et a laissé derrière lui plusieurs œuvres majeures.
III. L’éloquence au Moyen Âge et à la Renaissance
L’éloquence médiévale
Au Moyen Âge, l’éloquence prend une dimension religieuse. Les prêches et les sermons deviennent les principaux vecteurs de l’art oratoire. Les techniques rhétoriques sont adaptées pour servir la foi et diffuser les enseignements de l’Église.
L’éloquence humaniste
La Renaissance voit l’émergence d’une nouvelle forme d’éloquence, inspirée de l’Antiquité : l’éloquence humaniste. Les grands orateurs de cette période, tels que Érasme ou Thomas More, cherchent à concilier les valeurs chrétiennes et les idéaux de l’Antiquité. Ils redécouvrent les textes anciens et s’en inspirent pour élaborer leurs propres discours.
IV. L’éloquence classique
Le Grand Siècle
Le Grand Siècle français est marqué par un essor exceptionnel de l’éloquence. Les orateurs de cette époque, tels que Bossuet, Racine et La Fontaine, cherchent à sublimer la langue française et à exprimer leurs idées avec élégance et précision. Dans la perspective de la rhétorique classique, la structure du discours éloquent respecte un format et des étapes bien précises, desquels on peut toujours s’inspirer aujourd’hui.
Les grands genres de l’éloquence classique
L’éloquence classique se manifeste à travers différents genres littéraires. Le théâtre est l’un des principaux vecteurs de l’éloquence, avec des auteurs tels que Molière et Corneille. L’éloquence se retrouve également dans la poésie, la prédication et les mémoires.
V. L’éloquence moderne et contemporaine
L’éloquence politique et révolutionnaire
L’époque moderne est marquée par un renouveau de l’éloquence, avec l’avènement de la Révolution française. Les discours de Danton, Robespierre et Mirabeau témoignent de la force de l’éloquence politique pour mobiliser les masses et défendre des idées.
L’éloquence au XXe siècle
Au XXe siècle, l’éloquence continue de se développer dans de nouveaux contextes. Les discours de Martin Luther King, Charles de Gaulle et Winston Churchill marquent l’histoire par leur force de persuasion et leur impact sur les événements. La télévision fait son apparition et parallélement émerge en tant que discipline à part entière la communication politique, ou « com’pol » pour les intimes. L’offre s’étoffe avec le media training et toutes les déclinaisons possibles de l’art oratoire en situation… La préparation au débat contradictoire, typique du débat politique et des clashs télévisés, s’inspire souvent très directement de Schopenhauer et son « art d’avoir toujours raison » !
L’éloquence à l’ère numérique
À l’ère du numérique, l’éloquence prend de nouvelles formes. Les TED Talks, les podcasts et les discours en ligne permettent aux orateurs de toucher un public toujours plus vaste. Les techniques de l’éloquence continuent d’évoluer pour s’adapter à ces nouveaux médias et capter l’attention des auditeurs. Il est crucial pour l’orateur contemporain, le conférencier ou même le formateur, de prendre en compte ces aspects techniques et les innovations technologiques pour rendre ses interventions plus dynamiques et captiver le public.
Conclusion : quelle sera la prochaine évolution ?
En somme, l’éloquence a traversé les âges et les civilisations, évoluant sans cesse pour s’adapter aux contextes et aux enjeux de chaque époque. De la Grèce antique à nos jours, l’art de bien parler et de persuader demeure une compétence essentielle, aussi bien dans le domaine politique que dans la sphère privée. C’est une toute nouvelle rhétorique qui émerge aujourd’hui, qui change dans sa forme et de par les médias utilisés, mais qui repose toujours sur l’aspect fondamental de l’orateur : son humanité, sa volonté de bien faire et de persuader dans un but bien précis, pour faire avancer une cause ou un projet et se rapprocher d’un idéal qui l’anime viscéralement…