Peut-on fixer une limite à l’ambition ? N’est-elle pas, par définition, caractérisée par une forme de déraison ? Vous connaissez le diction : « visez la lune, si vous échouez au moins vous finirez dans les étoiles ». L’idée est de toujours viser plus haut, plus loin, plus fort, plus grand, plus gros ! Pourtant, vous connaissez aussi cet autre dicton : « le mieux est souvent l’ennemi du bien », et se fixer un objectif ou un seuil raisonnable évite bien des déconvenues et se révèle plus efficace que d’être trop vorace.
C’est en quelque sorte le principe paradoxale défendu par l’Egyptien Naguib Sawiris, l’un des hommes les plus riches d’Afrique. Avant de se lancer en politique, Naguib Sawiris a dirigé Orascom, le principal opérateur de téléphonie d’Egypte. Au début de l’année 2011, alors que le peuple se pressait sur la place Tahrir, il discutait avec la journaliste Chrystia Freeland et lui avait expliqué ceci : « Je n’arrive pas à comprendre tous ces dictateurs qui volent le peuple et qui détournent jusqu’au dernier sou. Pourquoi ne se contentent-ils pas de voler 1 milliard de dollars et de donner le reste au peuple ? Avec 1 milliard, vous avez le yatch, le jet privé… Un milliard, c’est le bon chiffre ! »
Est-il possible de fixer une telle limite à l’ambition, lorsqu’il semble si facile d’aller plus loin, beaucoup plus loin ? Où trouver la force morale de s’arrêter « en si bon chemin » ? C’est pourtant un principe fondamental : viser le maximum produit souvent des effets contreproductifs, lorsque cela se fait au détriment d’un trop grand nombre d’autres personnes. Il y a donc un optimum à rechercher (voir notamment l’optimum de Pareto). Dans le cas des dictateurs, qui asservissent des populations entière, le « milliard » pourrait être cet optimum. Et vous, dans votre vie ou votre situation actuelle, identifiez-vous les ressorts d’une ambition dévorante qui risquerait de se retourner contre vous ? Quel serait, à votre niveau, l’optimum auquel vous pourriez chercher à vous stabiliser ?