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10 procédés rhétoriques au service d’une idée politique

Dans l’émission Ce soir ou jamais (France 3) en date du 11 octobre 2011, l’ancien ministre de l’économie Alain Madelin déploie en à peine 2 minutes tout un arsenal rhétorique face à ses contradicteurs pour défendre la mondialisation libérale contre le protectionnisme national. Quoi qu’on pense lui, de son style ou de ses idées, les procédés qu’il utilise sont à retenir comme autant de commandements de tout bon débatteur politique. Vous pouvez retrouver l’émission sur youtube, le passage qui nous intéresse démarre à la 30e minute et plus exactement à 30’37 », voir ci-dessous :

Le passage est court, le débit de parole soutenu et les mouvements rapides : d’un revers de la main, à la manière d’un magicien, Madelin fait « apparaitre » un objet, le smartphone, qu’il utilise comme prétexte pour developper son argumentaire. « Utiliser un objet » n’est que l’une des 10 techniques qu’il mobilise. Détaillons ces différentes techniques, qui sont à retenir comme les 10 commandements rhétoriques de tout bon débatteur politique :

1 – Les opinions tu catégoriseras

Sa charge démarre par une catégorisation, c’est-à-dire par le fait de ranger ses contradicteurs dans une petite case si possible exécrable et affublée d’un « -isme » : ici, le « protectionnisme« . Alors même que certains pourraient s’en réclamer, tous cherchent ici à s’en défendre, telle Anne Hidalgo qui déclare (à 31’58 ») : « Je ne suis pas pour le protectionnisme » – et tente de lui substituer une autre formule : « Je suis pour le juste échange« …

Les catégories en “-isme” ont cet effet repoussoir et péjoratif bien expliqué par Schopenhauer (stratagème n°32 de L’art d’avoir toujours raison) : en casant ainsi les propos de son adversaire, on laisse entendre que nous sommes bien au fait de ses idées, que tout a été dit sur le sujet, que tous ses arguments ont été épuisés et qu’il n’y a rien à ajouter. La catégorisation est une sorte de réfutation en bloc du point de vue des auditeurs ou téléspectateurs.

Lorsque que vous voulez détruire, du moins rendre douteuse une affirmation de votre adversaire, rangez-là dans une catégorie, quelque qu’elle soit, pour peu qu’elle s’y rattache par similitude ou même très vaguement. Trouvez-lui un nom en « -isme », piochez pourquoi pas au hasard parmi les exemples fournis par Schopenhauer : « C’est du manichéisme ; c’est du pélagianisme ; c’est de l’idéalisme ; c’est du spinozisme ; c’est du panthèisme ; c’est du naturalisme ; c’est du rationalisme ; c’est du spiritualisme ; c’est du mysticisme… »

Les grands classiques, à clamer de façon particulièrement outrée : « C’est du fascisme ! C’est du racisme ! C’est du nazisme ! » A n’utiliser cependant qu’en extreme recours, quand on se sait soi-même acculé, car le débat atteint alors son point Godwin, ce qui en marque aussi la fin – ou le début d’une escalade dans la violence et la bêtise…

2 – Par le concret tu capteras

C’est un principe de base du storytelling : pour captiver son auditoire, il faut lui donner des exemples concrets qu’il puisse facilement visualiser.
D’une façon générale, évitez de chercher des idées trop complexes, ou de les exprimer de façon trop abstraite. Parlez de choses physiques, palpables, insistez sur les couleurs, les formes, les volumes et les longueurs. Pour trouver les bons exemples, vous pouvez notamment utiliser la technique de la photo mentale.

Ici, Madelin fait plus fort encore. Il ne se contente pas d’exemples à l’oral mais introduit un objet, sur lequel se dirigent aussitôt tous les regards. L’objet n’a rien d’exceptionnel en soi et c’est là toute sa force : quasiment tout le monde a un portable et l’utilise au quotidien, et peut aussitôt attraper le sien comme preuve matérielle des idées avancées. La relation de proximité qui nait ainsi avec les spectateurs ou téléspectateurs se base autant sur du visuel que de l’usuel. Utiliser un objet est une technique très puissante. Une alternative peut être de faire un dessin, ce qui confère un caractère dynamique à l’élément visuel. Selon la configuration d’une intervention, pensez-y !

Regardez bien la gestuelle de Madelin : il n’a pas fini sa phrase d’introduction qu’il porte déjà la main à sa poche (30’34 »), tel un magicien qui détourne l’attention de son public par ses paroles pour imposer la stupéfaction par une quelconque apparition. Il sèche aussitôt son contradicteur qui l’accuse de vivre « dans un monde complètement irréel » (30:38) : en saisissant cette preuve matérielle, difficile de nier sa connexion au réel… Tout le monde se tait, stupéfait, et attend docilement le prochain coup de théâtre.

3 – Sans fin tu énumèreras

L’énumération est un procédé puissant qui produit un effet de foisonnement, comme tout autant de preuves et d’exemples se succédant à l’infini, donnant ainsi une force quantitative à l’argumentation. Son portable en main, Madelin énumère tous ses composants, jusqu’au plus petit : GPS, Bluetooth, écran, mémoire, processeur… Ce qui le retient d’aller plus loin, c’est simplement la limitation du temps à l’antenne – du moins c’est l’impression qu’il donne aux spectateurs. Et pendant tout ce temps, ses contradicteurs se taisent, attendant de voir où il veut en venir… Redoutable.

4 – La main tu garderas

Parler à moitié, c’est comme ne rien dire. En politique comme dans d’autres domaines, il faut suffisamment développer ses idées pour espérer que celles-ci soient comprises et entendues. D’où la difficulté d’intervenir à la télé, qui ne donne que rarement aux invités le temps d’aller jusqu’au bout de leurs raisonnements. Comment Madelin réussit-il donc à garder la main pendant plus de deux minutes, ce qui peut sembler un record dans sa situation face à tant de contradicteurs ? Son secret tient dans le rythme de son intervention.

Pour ne pas perdre votre interlocuteur, fournissez-lui des repères suffisants et clairs pour qu’il comprenne (ou suppose) où vous en êtes dans votre démonstration. Madelin marque très clairement les différentes séquences de son intervention. La “preuve matérielle” (30’38 ») est introduite par “Regardez ce téléphone“, ce qui donne un temps de latence, et coupe net un autre invité qui voulait réagir. A la deuxième tentative de réaction (de la part d’Anne Hidalgo, 31’09 »), Madelin annonce une double conclusion

Quand un interlocuteur est trop long dans ses développements, il est normal de le couper. Cependant, quand celui-ci annonce qu’il va conclure, difficile de l’arrêter à ce moment clef ! La force de Madelin est d’annoncer ici une conclusion en deux temps, ce qui revient en réalité à s’accorder deux nouveaux développements, chacun ouvrant une nouvelle parenthèse. Sur la durée totale de l’extrait, vous observez d’ailleurs que la conclusion… dure 2 fois plus de temps que la première partie ! Mais l’annonce de la fin de son intervention oblige ses contradicteurs à attendre, une fois de plus, leur tour de parole, supposé imminent.

5 – Te faire couper tu éviteras

Le débat est un combat. Lors d’une joute oratoire entre opposants politiques, tous les coups sont permis. Toucher et parer, voilà ce qui importe, et quand on sent que l’on va perdre, il nous faut encore empêcher l’adversaire de gagner. Pour cela : le couper, le déstabiliser, l’empêcher de mener son argumentation à terme, de développer convenablement sa thèse.

Par le rythme de son intervention, Madelin garde la main. Encore faut-il avoir suffisamment de cran pour ne pas se laisser déstabiliser. Ses contradicteurs tentent à plusieurs reprises de le couper, mais il continue de parler sans se soucier de leurs réactions, ne se laisse pas surprendre et ne marque aucun temps d’arrêt. Il reste focalisé sur ses idées. Le secret ? Être convaincu de son bon droit, être suffisamment sûr de soi, être totalement imprégné du message que l’on veut faire passer, avoir un minimum préparé et répété les passages les plus importants.

Une séquence comme celle-ci ne s’improvise pas. Elle suppose d’avoir mûrement réfléchi au sujet, d’en manipuler régulièrement les concepts, et de cultiver tant son esprit critique qu’un certain sens pratique. C’est parce que les idées sont maîtrisées que le discours est fluide et la répartie spontanée. Et pour cela, il faut s’entraîner. Rappelez-vous : improviser ne signifie pas ne pas se préparer, mais au contraire se préparer à toutes les éventualités, pour réagir facilement sur n’importe quel sujet ou aspect du sujet.

6 – Le regard tu maintiendras

Fondamental dans toute prise de parole : le regard. C’est par lui que s’établit vraiment le contact entre un orateur et ses interlocuteurs.
Un contact visuel franc et direct permet autant d’établir une relation cordiale, que de tenir l’autre en respect. Il faut regarder pour capter, il faut regarder pour s’imposer. Lors d’une joute verbale, gardez toujours un œil sur votre ennemi ! Mais tachez aussi de montrer aux auditeurs ou spectateurs que vous ne les oubliez pas, en vous tournant régulièrement vers eux. Voyez comme Madelin garde Anne Hidalgo en ligne de mire. Voyez aussi comme il va chercher le public en allant presque jusqu’à se retourner (31’39 »), son léger demi-tour accompagnant sa gestuelle lorsqu’il énumère plusieurs pays.

Son regard est stable, à hauteur de celui des autres invités. Il ne baisse jamais le regard, si ce n’est par quelques coups d’œil furtifs pour pointer son portable, qu’il utilise pour sa démonstration. Cette attitude lui confère une autorité et un charisme indéniables.

A l’inverse, voyez comme Anne Hidalgo peine à affirmer sa position, lorsqu’elle déclare “Je suis pour le juste échange” (formule répétée trois fois avec insistance, comme si elle devait elle-même s’en convaincre ou ne savait quoi dire de plus, à partir de 32’00 ») : plutôt que de faire face à Madelin, elle se tourne vers le journaliste comme pour avoir son soutien, de la même façon qu’une docile petite écolière chercherait l’approbation de son maître d’école. Par-delà le contenu même du message, le regard est la clef de toute intervention réussie.

7 – Le débat tu ouvriras

Arrivant à la fin de son intervention, Madelin conclut son propos mais ne le clôture pas. Au contraire : il ouvre le débat : « Les immigrés dehors je suis contre, je trouve que c’est complètement absurde » (32:12). Une formule que peu sur ce plateau pourront désapprouver, et surtout qui déplace le problème : on passe indirectement du problème de la mondialisation, des délocalisations et de la menace de la Chine à un problème de politique intérieure, l’immigration, sujet glissant s’il en est. Le protectionnisme pose bien la question de la fermeture des frontières, mais pas exactement sur ce plan là ! La formule de Madelin est suffisamment ambiguë pour projeter tous ses interlocuteurs sur une pente glissante et leur faire risquer un dérapage incontrôlé…

Souvent utilisée pour esquiver, la technique de l’ouverture correspond en partie au stratagème n°19 (de L’art d’avoir toujours raison, Schopenhauer). Plus vous limitez votre propos, plus vous êtes vulnérable, car vos contradicteurs pourront d’autant mieux cibler leurs attaques. Plus vous ouvrez de pistes et plus vous donnez à vos adversaires des occasions de s’y perdre !

8 – Ton adversaire tu attaqueras

L’attaque ad hominem consiste à mettre en lumière l’incohérence des propos de ses contradicteurs. Associée à l’argument ex concessis, ils constituent le stratagème n°16 de L’art d’avoir toujours raison. Schopenhauer précise : « Quand l’adversaire fait une affirmation, nous devons chercher à savoir si elle n’est pas d’une certaine façon, et ne serait-ce qu’en apparence, en contradiction avec quelque chose qu’il a dit ou admis auparavant, ou avec les principes d’une école ou d’une secte dont il a fait l’éloge, ou avec les actes des adeptes de cette secte, qu’ils soient sincères ou non, ou avec ses propres faits et gestes. » En gros, faire dire à son adversaire cette formule bien connue : « Faites ce que je dis, pas ce que je fais ! »

Attention à ne pas confondre l’attaque ad hominem avec l’attaque ad personamla première étant généralement prise pour la seconde ! A la différence de l’ad hominem (qui ne vise pas la personne de l’adversaire mais la cohérence de ses propos), l’attaque ad personam s’apparente aux injures, insultes, ou tout autre propos désobligeant, blessant et grossier…
Madelin projette une attaque ad hominem bien sentie quand il rappelle à Hidalgo : « … c’est la TVA sociale qu’avait introduit l’un de vos candidats… » (32’42 »). Ce n’est pas tant le propos d’Hidalgo qui est ainsi visé, mais son incapacité à défendre une ligne claire en accord avec d’autres représentants du PS. En tant que porte-parole de ce parti, son message apparaît dès lors comme embrouillé, jetant le discrédit sur ses idées.

9 – Les figures de style tu utiliseras

Lorsque Madelin, à la toute fin de l’extrait, regrette qu’il y ait « trop de Montebourg et pas assez de Steve Jobs« , il utilise ce qu’on appelle une antonomase. Ce terme barbare désigne en rhétorique classique la simple substitution à un nom commun d’un nom propre ou d’une périphrase qui énoncent sa qualité essentielle, ou réciproquement. Exemples : Harpagon pour avare ; Tartuffe pour hypocrite ; Hercule pour extraordinaire…

Comme l’explique Cicéron, les figures de mots et de pensée sont en quelques sortes les « outils de l’éloquence » (Cicéron, L’orateur idéal, p.51). Il faut user de ces « ornementations verbales » avec parcimonie et discrétion.

10 – T’entraîner tu continueras

Ce dixième « commandement » ne fait pas directement référence à un passage de l’extrait. Il s’agit plutôt d’une invitation à toujours prendre du recul par rapport à ce qui est dit et ce qui est fait, et chercher ce qui pourrait ou aurait pu être dit et fait. C’est en réfléchissant à toutes les réponses possibles que l’on prépare d’autant mieux ses prochaines attaques et défenses, d’un bord comme de l’autre. On peut être favorable aux idées de Madelin ou totalement contre, cela n’empêche pas de reconnaître dans cet extrait un grand moment d’art oratoire, une parfaite maîtrise du débat, et l’habile mobilisation de procédés rhétoriques adaptés à la défense d’une idée politique.

Prenez donc le temps de vous mettre en situation, tantôt à la place de la porte parole PS (Anne Hidalgo), tantôt à la place de l’ancien ministre de l’économie (Alain Madelin) et réfléchissez à tout ce que vous auriez pu dire ou répondre. Par exemple : malgré quelques difficultés et plusieurs tentatives loupées, Anne Hidalgo réussit tout de même à caler sa petite formule : « Je suis pour l’échange juste » – en l’opposant implicitement à « l’échange libre » de Madelin. Ce dernier ne relève pas, et pourtant… Il manque peut-être là une occasion de marquer les esprits des téléspectateurs. Ceux-ci se diront, après l’avoir écouté, qu’il « a peut-être raison », mais que cette raison est finalement l’antithèse de la compassion. A quoi bon la liberté si celle-ci ne profite qu’au « renard libre dans le poulailler libre » ? Selon vous, qu’aurait pu répondre Madelin pour définitivement lui clouer le bec ?

En rhétorique, on parle de prolepses : aller au-delà des objections que l’on pourrait nous adresser. Ces objections et critiques arrivent généralement après nos interventions, dans la phase consacrée de « questions/réponses ». De même, dans un débat, on imagine toujours avoir le temps de developper ses arguments, alors que c’est en réalité rarement le cas, et il faut parer aux objections des les premiers mots prononces ! Quoi qu’il en soit, on s’attache toujours davantage aux idées et formules que l’on souhaite exprimer, plutôt qu’aux ripostes, car on sous-estime quasiment toujours la violence des réactions et de la repartie de nos contradicteurs… Pourtant, penser aux prolepses devrait être la première chose et la plus urgente dans toute préparation !

Pour aller plus loin, voici deux articles à (re)lire : Les 5 étapes fondamentales par lesquelles doit passer tout bon orateur selon Cicéron et Savez-vous vraiment ce qu’il y a de plus important dans un discours ?

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Philosophie du leadership : developper sa vision en feuilletant le grand livre du monde…

Le monde, comprenez la Terre, ou même l’univers, est souvent comparée a un grand livre. C’est une métaphore a destination des scientifiques qui considèrent qu’il suffit d’observer le monde pour y puiser de la connaissance comme dans un livre ouvert… La métaphore est belle, mais elle pose un problème : si le monde est un livre, c’est un livre tellement grand qu’on ne pourra jamais le lire en entier ! On ne pourra peut-etre même pas terminer un seul petit chapitre le temps d’une vie… Les scientifiques se sont peut-etre resignes a ce fait. Mais le leader doit avoir une vue globale qui embrasse le monde tout entier. L’élaboration de sa vision est a ce prix. Comment faire, donc, pour « lire le livre du monde » sans pour autant lire en diagonale et n’avoir qu’une vue superficielle des choses ? Filons la métaphore jusqu’au bout : si le monde est un livre, est-il obligatoire de le lire totalement, complètement, ligne par ligne et mot par mot ? Pourquoi ne pas le feuilleter, tout simplement, comme nous pouvons le faire avec tant d’autres livres, pour passer en revue une bibliothèque entière ? Vous me suivez ?

Avoir une vision, c’est se représenter le monde tel qu’il est, d’une part, et tel qu’il peut être, d’autre part. Et c’est surtout de pouvoir montrer, faire voir, le chemin qui mène de l’un a l’autre. C’est cela la vision, « avoir une Vision » avec un grand V, et c’est pour cela que c’est si important pour s’affirmer en tant que leader. Le leader devient un guide vers un monde meilleur en ces temps incertains… La vision du leader lui permet de voir cet au-dela, ce nouveau lieu. Mais… Un lieu n’existe pas en soi : il existe par la relation que l’on entretient avec lui… La réalité existe par les rapports que nous entretenons avec elle, puisqu’elle n’y est que lorsque nous y sommes… Le leader doit donc s’efforcer de préserver de bonnes relations avec la réalité, de même avec ce lieu auquel il veut nous conduire.

Le leader doit toujours oeuvre en direction de l’achèvement de sa quête, sans jamais vraiment y parvenir, sans jamais pouvoir l’achever, car c’est c’est cet inachevé qui lui permet de continuer a avoir des choses pour lesquels oeuvrer. Au leader incombe toujours de trouver toutes les bonnes raisons pour ne plus avoir besoin de bonnes raison de faire tout ce que ceux qui le suivent ont envie de faire. Son influence est a ce prix. Il doit aussi savoir susciter l’envie incessante de faire de nouvelles choses, donc d’inventer de nouvelles choses a faire. En ce sens le leader doit s’efforcer d’ouvrir de nouveaux domaines de recherche. Par exemple, inventer chaque année de nouvelles couleurs pour voir le monde avec plus de nuances, et ainsi affiner les expériences. Les couleurs sont perçues, ou mieux perçues, parce qu’on peut les nommer. Il ne s’agit pas tant de faire surgir de nouvelles couleurs en soi, mais de trouver de nouveaux noms pour ce qui existait déjà sous nos yeux, sans que nous soyons toujours capable de le voir. Trouver un beau nom aux choses est aussi une façon de les embellir, sans même y toucher.

Le leader sait que rien n’est important ni n’a de valeur, mais il fait croire que si. Il sait que rien n’est important ni n’a de valeur sauf ce a quoi nous donnons de la valeur et de l’importance, et c’est a travers sa vision qu’il nous amène a donner de la valeur et de l’importance a toujours plus de choses, peut-etre au monde dans son ensemble… C’est par sa vision qu’il nous amène a créer toujours plus de richesses, même si ces richesse n’ont aucune valeur si ce n’est a travers son regard sur cette dite richesse. C’est la vision du leader qui valorise ce que nous faisons, sans quoi nous ne ferions rien car nous n’y verrions aucune importance ni aucun intérêt. La vision du leader nous promet la richesse, la vision du leader nous rend riche. Seul le leader ne peut jamais vraiment capter aucune valeur que ce soit : il sait qu’elle n’existe que dans le coeur de celles et ceux qui le croient.

La vie n’a aucun sens. Cette considération donnerait le vertige a n’importe quel individu « normal » ou « moyen », mais le leader n’a pas peur de se pencher au-dessus de ce vide existentiel. Sa vision ne donne pas automatiquement un sens a la vie. Le leader ne prétend pas pouvoir donner officiellement un sens a nos existences, non, la vie n’a pas de sens officiel précis. Mais c’est justement la liberté qu’offre la vision large du leader : puisqu’il n’y a pas de sens officiel, nous pouvons librement choisir parmi tous les sens déjà existants, ou en créer de nouveaux. Même au sein des religions établies depuis des millénaires : le leader religieux ultime n’étouffe pas les innombrables sectes qui ne manquent jamais de naitre. Les gourous ne sont pas des leaders. Les gourous n’inspirent pas la liberté comme le fait la vision du leader : les gourous ne sont qu’un epiphénomène de la liberté, elle-meme résultante d’un authentique leadership politique.

Au fond, le sens de la vie est surtout une histoire de gout. Selon vos gouts, vous pouvez explorer le sens qui vous plait, avant d’entamer ce grand voyage en direction des innombrables sens de vos existences. Le leader vous guide. Le leader vous couve. Vous ne pourrez jamais sortir de l’oeuf. L’oeuf, c’est l’autre nom de la Matrix. Le role essentiel du leader est de maintenir l’espoir au sein de l’oeuf, de stimuler la vie même si tout est déjà étouffé dans cet univers clos. Le leader doit faire vivre dans nos coeurs la croyance d’un infini, que l’infini soit dans ce monde ou au-dela.

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Les rêveurs sont les vrais bâtisseurs de ce monde

Avoir un rêve qui peut sembler complètement irréaliste, complètement fou… et soi-même être assez fou pour se dire que l’on peut quand même le réaliser. Voilà le secret de l’énergie, de la flamme intérieure, du bouillon vital. Sans cela… Sans assumer ce genre de rêve (parce qu’il s’agit bien de l’assumer face à la société, pas seulement y croire personnellement), on… s’ennuie. On ne sait pas pourquoi on vit, ni même pourquoi on agit.

Ce rêve est toujours forgé à travers une certaine conception du monde, de l’humanité, et vise à l’améliorer. Ceux qui ne croient pas en la possibilité d’un monde meilleur, qui en refusent l’idée, qui n’osent considérer que leur action puisse contribuer d’une façon même infime, même très indirecte à l’amélioration de l’humanité, ceux-là ne peuvent avoir goût en la vie. Ils ne peuvent que se laisser mourir, attendre dans l’angoisse que le temps passe. Ou chercher à se divertir pour tromper l’ennui – sans pour autant combler le vide de leur vie, sans comprendre pourquoi persiste leur ennui, sans comprendre pourquoi les divertissements ne les divertiront jamais assez.

Les pessimistes, ceux qui se prétendent « réalistes » sont en fait les pires ennemis de la réalité, les destructeurs insidieux de leur propre réalité. Tandis que les rêveurs… Les rêveurs sont aussi les vrais bâtisseurs de ce monde.

Oui, bien sûr que oui rêver est une activité à part entière ! Sans rêve, pas de vision. Sans vision, pas de motivation. Sans motivation, pas d’action. Sans action, aucune réalisation. Les rêves comme le travail sont nécessaires pour avoir un impact sur le réel. Les rêves sont à la source du travail. Rêver, dérouler en totalité un rêve fou et assumé, c’est déjà travailler.

(Donc le jour où vous me trouvez affalé quelque part les yeux fermés… Laissez-moi travailler !)

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Une méthode pour préparer et réussir vos interventions en public : croquez la P.O.M.M.E !

La réussite d’une intervention en public dépend en grande partie de sa préparation. Comment préparer vos interventions ? Il y a deux aspects à prendre en compte : d’une part, la préparation intellectuelle, d’autre part, la préparation matérielle.

La préparation intellectuelle concerne l’élaboration même du discours et englobe toutes les phases de réflexion, accumulation de connaissances, puis rédaction, répétitions, etc.

La préparation matérielle, quant à elle, a trait aux moyens mis en œuvre pour exprimer ce discours, selon que vous souhaitez utiliser un support visuel, distribuer des documents, vous servir de certains objets, organiser le lieu de votre intervention de telle ou telle façon, etc.

En vue d’une intervention en public, la préparation intellectuelle doit commencer le plus tôt possible, aussitôt que le sujet de l’intervention nous est donné : il faut chercher à accumuler un maximum d’information, et à les organiser progressivement.

Toutefois, pour préparer un discours de façon efficace, avant de se lancer dans l’élaboration même du message, encore faut-il répondre précisément à la question : à quel public dois-je m’adresser, et, en fonction, quel est mon objectif ?

A ce propos je vous invite à (re)lire mon article sur les différentes sortes de public… En guise de résumé :

  • Exemples de publics : généraliste / spécialisé / concerné par le sujet traité ou pas du tout ?
  • 4 objectifs fondamentaux : Informer / convaincre / divertir / pousser à l’action
  • Message : quels exemples, ou anecdotes ? / quelles références ? / quel(s) registre(s) de vocabulaire ? etc.

Ce n’est qu’une fois l’objectif fixé, lui-même défini en fonction d’un public clairement identifié, que vous pourrez vous concentrer véritablement sur votre message et son élaboration. Le style et le contenu d’une intervention ayant pour but de divertir n’est pas du tout celui d’une intervention visant à informer, ni même d’une intervention dont l’objectif est de convaincre et pousser à l’action

Voici donc, dans l’ordre, les étapes par lesquelles vous devez passer successivement en vue de préparer au mieux n’importe quelle intervention en public (les 3 premières concernent la préparation intellectuelle, les 2 dernières la préparation matérielle) :

  1. P ublic : Identifiez votre public pour déterminer votre objectif
  2. O bjectif : Quel est votre objectif ? Convaincre, informer, divertir…?
  3. M essage : Elaborez votre message en fonction de votre objectif.
  4. M atériel : Comptez-vous utiliser un support visuel, distribuer des documents ?
  5. E nvironnement : L’utilisation d’un certain type de matériel est conditionnée par l’environ-nement : faut-il utiliser une prise secteur ? La salle peut-elle être plongée dans le noir ? etc.

A retenir par coeur !

Et pour mieux vous en souvenir = Croquez la P.O.M.M.E !

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Les vœux du nouvel an : un exercice de communication stratégique pour les dirigeants

Adresser ses bons vœux à l’occasion du nouvel an est une épreuve de communication à laquelle un dirigeant ne peut se soustraire. Cette tradition est si enracinée dans notre culture qu’y manquer semblerait une faute de goût. De plus, elle fait partie de ces trop rares occasions pour un patron de s’adresser à l’ensemble de ses collaborateurs et salariés. Exercice périlleux s’il en est, il faut donc aussi voir la tradition des vœux comme un moment privilégié dans la perspective d’une communication stratégique de l’entreprise. Dès lors, comment en tirer pleinement partie ?

Lors d’une cérémonie de vœux, c’est bien à un exercice de prise de parole en public que se livrent les dirigeants. Face à tous leurs salariés, ils doivent s’assigner un but particulier, et non simplement « souhaiter leurs meilleurs vœux » par seul respect des traditions, au risque d’en faire une formule totalement vide de sens. Le dirigeant cherche-t-il à corriger son image ? A intégrer de nouveaux collaborateurs ? A préciser une nouvelle orientation, ou en suggérer une nouvelle ? Seul un objectif clarifié permet d’élaborer un message adapté, et de mobiliser en conséquence les techniques de communication appropriées. De là découlera le style que le dirigeant souhaite donner à l’événement (convivial, ou avec un cachet « formel »), et le lieu choisi en conséquence.

Il est donc fondamental d’envisager les « vœux » comme un exercice de communication stratégique à part entière. C’est une épreuve particulière de prise de parole en public, à ranger aux côtés des conférences de presse et des passages radio et autres media training, tout autant de situations communicationnelles qui exigent des compétences auxquelles les dirigeants modernes doivent impérativement se former et se préparer dans le cadre de leurs fonctions. L’enjeu est de rester authentique (ou de le paraître…), en tout cas de ne pas donner le sentiment d’être faux en jouant un rôle qui semble ne pas être le sien… Comme pour toutes ces situations de communication, il est utile d’être à l’aise dans un échange direct avec le public, et de maîtriser certaines techniques élémentaires mais décisives.

L’art de faire court et soigné : le fameux « KISS »

Quoi qu’il en soit, la règle d’or est de faire court et soigné. En 2018, le Président Emmanuel Macron s’était lui-même senti obligé de s’excuser pour la longueur de ses vœux, enregistrant une nouvelle capsule vidéo d’à peine une minute ! Les vœux ne sont pas un thème propice aux discours fleuves. La brièveté est de mise. Dix minutes offrent une durée largement suffisante, d’autant plus si l’allocution filmée fait ensuite l’objet d’une capsule vidéo à diffuser sur youtube ou les réseaux sociaux… Faites un KISS : Keep It Short and Simple !

Mais « court » ne rime pas avec avec « bâclé ». Aussi brève soit l’allocution des bons vœux, les destinataires doivent ressentir dans le message ainsi délivré tout le soin qui y a été apporté. Comme toute communication, celle-ci doit être suffisamment préparée en amont (élaboration des éléments de langage, insertion de formules rhétoriques cohérentes, répétition du discours en situation). Attention, il ne faut pas confondre les vœux avec une réunion d’information ou un speech de motivation. Ni PowerPoint, ni grandiloquence ne sont autorisés. L’exercice est périlleux en cela : garder un ton juste et mesuré, sans être ennuyeux pour autant. Savoir jouer avec les émotions de l’auditoire en lui racontant une histoire. Et bien sûr gérer son trac, éliminer les gestes parasites, éviter de s’empêtrer dans des phrases interminables et incompréhensibles, et éviter de faire un flop… Voici 3 techniques permettant de structurer efficacement un message marquant :

3 techniques pour augmenter l’impact de vos vœux

Technique n°1 : La liste de 3

La liste de 3 est l’une des techniques les plus fortes pour exprimer une idée. Elle n’augmente pas seulement automatiquement le pouvoir de conviction de l’orateur, mais transmet également un sentiment de structure, de rigueur, de complétude. Vous pouvez formuler une telle liste à partir de 3 résolutions par exemple, ou encore, de façon plus pertinente, en évoquant 3 moments particuliers : un moment fort de l’année passée, une réalisation en cours en ce début d’année, la présentation d’un grand projet pour l’année à venir…

La liste de 3 se combine très bien avec l’anaphore, cette dernière permettant de construire aisément un paragraphe par la répétition d’un même mot ou d’un même groupe de mots au début de chaque phrase. Par exemple :
« Améliorer la qualité,
Améliorer la réactivité,
Améliorer l’écoute,
Voici nos souhaits pour cette nouvelle année, que je vous souhaite pleine d’heureuses surprises. »

Technique n° 2 : Les questions rhétoriques

L’utilisation de questions rhétoriques (c’est-à-dire de questions n’appelant pas réellement de réponses de la part de l’auditoire) permet de renforcer facilement l’impact de votre message : plutôt que simplement dire « Ce que nous souhaitons pour cette nouvelle année… », une tournure interrogative implique le destinataire et crée une modulation vocale qui capte davantage l’attention, par exemple : « Que pouvons-nous souhaiter pour 2020? »« Que retenons-nous de 2019 ? »« Sous quel signe ouvrons-nous cette année ? », etc.

Technique n° 3 : Les paradoxes rhétoriques

« Ce n’est pas ceci, mais cela… » Un paradoxe rhétorique est une manière puissante et subtile de marquer les esprits. Il s’agit de soulever une contradiction apparente, de créer une mise en contraste ou en opposition qui fait ressortir une subtilité, une nuance inattendue. En structurant votre message sous forme de paradoxe, vous donnez matière à penser, à méditer, et vous gagnez en pouvoir d’inspiration. Par exemple : « Une résolution pour 2018, ça ne veut pas dire prendre une décision aujourd’hui pour l’abandonner petit à petit au cours des prochains mois. Ça veut plutôt dire s’entraîner petit à petit, dès aujourd’hui, pour se rendre compte que cette nouvelle habitude sera enfin prise en 2019… »

Formuler des vœux… et mobiliser des valeurs

Quel que soit le style, les techniques ou les éléments de langage utilisés, le point clef demeure de ne pas formuler des vœux « neutres » du type « meilleurs vœux », mais s’engager en plaçant ses vœux dans le cadre d’une valeur (ou concept mobilisateur) : « Que [cette année] soit l’année de liens plus forts au sein de notre entreprise »« Que [cette année] soit l’année d’une réussite collective impliquant tous les services dans un même projet », etc.

L’usage d’un paradoxe permet tout particulièrement de faire ressortir un concept mobilisateur. Il est également possible d’élaborer une métaphore inspirante à partir d’un concept mobilisateur. Le concept mobilisateur peut lui-même être répété au début (anaphore) ou à la fin (épiphore) de chaque phrase d’un paragraphe pour rythmer celui-ci et produire un effet d’insistance.

Toutefois, selon le protocole, il est préférable de ne pas évoquer l’aspect financier de la réussite. Ne parlez pas d’argent ou de rémunération dans vos vœux. Insistez davantage sur l’accomplissement, l’épanouissement, le plaisir ou encore l’échange. Et une cérémonie des vœux rondement menée en sera la meilleure marque.

Je vous souhaite une excellente année, placée sous le signe de l’éloquence !

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De l’usage du balai en politique

Arnold Schwarzenneger lors de sa campagne en 2003

Lors d’un discours ou d’une conférence, l’utilisation d’un objet est une excellente technique pour capter l’attention du public.

Attention toutefois aux objets que l’on veut utiliser, aux symboles qu’ils peuvent véhiculer. Dans les discours politiques, le fait d’utiliser un objet oscille toujours entre symbole et preuve matérielle.

Par exemple, lors des meetings pendant sa campagne électorale de 2003, Schwarzenneger brandissait un balai en clamant qu’il voulait « nettoyer » la politique en Californie : il passait alors pour l’homme fort de la situation, prêt à retrousser ses manches et à « mettre les mains dans le cambouis ».

Par contre, lorsque Ségolène Royal déclarait, en vue des primaires socialistes en 2011 : « Il y aura du ménage à faire. Et ce n’est pas plus mal que ce soit une femme qui soit élue pour faire le ménage. Un bon coup de balai, et hop ! », il aurait été malvenu qu’elle s’empare à son tour réellement d’un balai : l’image l’aurait faite passer pour une femme docile et soumise, assignée aux tâches ménagères, tout le contraire de ce que les électeurs attendent d’un(e) leader en politique. La formule même fut jugée sexiste par nombre de commentateurs…

L’objet que l’on choisit a toujours une dimension symbolique, ou renvoie toujours à un certain imaginaire. Un même objet peut avoir un sens très différent selon qui s’en sert.

La grande force de l’objet est cependant de nous rattacher directement au réel. Il peut même avoir valeur de « preuve matérielle » par rapport aux idées que l’on défend (voir par exemple Alain Madelin dans l’émission Ce soir ou jamais du 11 octobre 2011).

A ce titre, il faut donc distinguer l’objet utilisé comme preuve, exemple ou illustration, de l’objet utilisé uniquement comme symbole ou signe distinctif pour fédérer les militants de tel parti politique ou tel mouvement social à travers une identité visuelle forte.

Cela dit cette technique de l’objet est finalement assez peu utilisée en communication politique, en tout cas dans notre pays. L’essentiel du travail de nos spin doctors et autre communicants institutionnels porte le plus souvent sur les argumentaires, les éléments de langage, les formules et « petites phrases », c’est-à-dire sur l’impact verbal de la communication.

Le travail sur l’impact visuel, par le media training notamment, se limite généralement à corriger certains défauts, gestes parasites ou mouvements gênants. La plupart des hommes et des femmes politiques cherchent d’abord à se mettre en scène eux-mêmes, à mettre en scène leur corps. Ils se concentrent davantage sur une posture, une gestuelle qui leur serait propre, leur permettant d’affirmer un « style », une personnalité.

Par ailleurs leurs slogans et leurs « petites phrases » sont plus facilement répétés telles quelles, tandis que les images sont davantage sujettes au détournement (montages photoshop etc). C’est pourquoi l’utilisation d’objets ou même d’accessoires reste secondaire, considérée avant tout comme une gêne ou un risque dans leur communication.

Enfin, miser sur le visuel et le côté spectacle est un mode de communication très « à l’américaine », dénigré dans la conception politique française. C’est sans surprise de voir que la technique est le mieux maîtrisée outre-Atlantique.

Al Gore utilise à perfection ces techniques visuelles : objets, photos, dessins, films d’animation, jusqu’à l’utilisation d’un élévateur pour suivre la courbe d’un schéma… Sans cela, faire un film de sa conférence sur le changement climatique aurait été difficilement envisageable.

En France, le discours est encore trop souvent envisagé comme un exercice essentiellement « littéraire » : on se concentre sur la rédaction d’un texte avant de penser à sa mise en scène, au jeu de l’orateur qui devra prononcer ce discours. Certes, il ne faut pas sacrifier le fond à la forme : la parole doit demeurer au service d’une idée. Mais une approche plus « théâtrale » est souhaitable. C’est tout l’enjeu de l’art oratoire.

Toutefois, à l’ère de youtube et du tout vidéo, cette technique devrait davantage se développer, au risque des détournements que cela pourra susciter (comme dans le cas de Nétanyahou) – ou précisément pour provoquer ces détournements et faire le buzz sur internet…

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8 règles fondamentales pour toute campagne électorale

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A l’occasion d’un conférence dans le Midwest en mars 1959, Ted SORENSEN, conseiller de J.F. KENNEDY, mettait en relief les ressorts de la campagne qu’il leur fallait conduire :

1. Une volonté dévouée comme Paul REVERE vaut dix mercenaires.

2. Les lettres personnelles comptent plus que les entêtes prestigieuses.

3. Cinquante personnes donnant chacune un dollar valent plus qu’une seule qui en donne cent.

4. Une conversation politique avec quelqu’un qui n’est pas convaincu vaut mieux qu’une conversation politique avec quelqu’un qui est déjà convaincu.

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5. Une réunion dans une salle publique pleine d’électeurs vaut deux réunions dans une chambre d’hôtel pleine de fumée.

6. Mieux vaut secouer le bateau que naviguer sous de fausses couleurs.

(En ce qui concerne les points litigieux).

7. Aucune voix n’est acquise, à l’exception peut-être de celle de votre mère ; et encore, assurez-vous qu’elle est inscrite sur les listes électorales.

8. Une heure de travail en 1957 vaut deux heures de travail en 1958.

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Le premier débat présidentiel des élections US 2012 : Romney en attaque, Obama en défense

Mercredi 3 octobre 2012 avait lieu à Denver (dans le Colorado) le premier débat entre les candidats à l’élection présidentielle américaine, opposant Barack Obama (démocrate) et Mitt Romney (républicain) :

Obama, président sortant, a pour lui la popularité, mais doit défendre son bilan. Romney, moins connu, profite à l’inverse d’une position lui permettant d’attaquer plus directement son rival.

Et ces deux positions d’attaque et de défense se sont clairement ressenties dans l’attitude générale des candidats : Romney était particulièrement combatif et incisif, prêt à « rentrer dedans », tandis qu’Obama semblait plus froid, plus distant, comme « en recul »…

Le Président se devait d’être technique dans ses propos, pour expliquer et justifier ce qui avait été fait pendant son mandat, alors que son opposant républicain, au risque d’être parfois approximatif, pouvait être plus virulent pour critiquer, ou plus ardent pour évoquer ses projets.

Regardez comme les réponses d’Obama semblent longues, notamment dans la deuxième partie du débat ! Au contraire, Romney joue la carte des petites phrases.

Ses approximations sont par ailleurs compensées par une présentation très claire de ses idées : il les présente en effet sous forme de listes de points, procédé rhétorique proche de l’énumération qui confère ici une certaine rigueur à ses propos. Voir par exemple, dès sa première prise de parole, vers 05’55 : « My plan has five basic parts. One… Number two… Number three… Number four… Number five… »

Puis, deuxième intervention, de 09’37 à 12’40, qu’il découpe ainsi : « First of all… The second area… The third area… »

Troisième intervention, de 15’06 à 16’47 : « That’s part one… Number two… Number three… » ; et ainsi de suite…

Quasiment toutes ses interventions se divisent en 3 points clairement établis !

En donnant de tels repères dans ses interventions, il donne aussi l’impression que son mode de pensée est particulièrement rigoureux, que ses idées sont très structurées et ordonnées. Et permet au public de le suivre plus facilement.

Cela dit, cette apparence de rigueur ne se fait pas au détriment de l’expression d’une certaine chaleur du personnage. Romney-le-mormon, habituellement dépeint dans les medias français comme un individu sec et austère, réussit plusieurs fois à dérider l’assemblée.

Dès son introduction, il ironise : « And congratulations to you, Mr. President, on your anniversary. I’m sure this was the most romantic place you could imagine here… here with me… » Ce qui amuse tout le monde – une bonne façon de se mettre les rieurs dans la poche !

Déclarant qu’il arrêterait de financer PBS, réseau de télévision public, il ajoute qu’il aime pourtant bien « Big Bird » (l’oiseau géant du programme pour enfants diffusé sur l’une des chaînes de ce réseau). « And I like you too », lance-t-il directement au présentateur, qu’il appelle par son prénom, Jim.

Tout autant de petites formules surprenantes qui ont marqué, et qui font parler.

Big Bird Mitt Romney
Big Bird, la marionnette de l’émission « Sésame Street » – Un exemple parmi les nombreux détournements qui ont immédiatement circulé sur la toile après la déclaration de Mitt Romney.

Il verse également dans le registre émotionnel. Encore dans son introduction, il raconte qu’il était à Dayton, dans l’Ohio, « and a woman grabbed my arm, and she said, I’ve been out of work since May. Can you help me? » (05’20).

Il poursuit : « a woman came up to [Ann – sa femme] with a baby in her arms and said, Ann, my husband has had four jobs in three years, part-time jobs. He’s lost his most recent job, and we’ve now just lost our home. Can you help us? »

Dans le premier exemple, une femme attrape son bras : on imagine toute la détresse de cette pauvre dame qui s’agrippe comme elle peut à quelqu’un qui l’écoute… Dans le second exemple, il joue sur les valeurs familiales en impliquant son épouse, Ann, vers qui accourt une autre femme, un bébé dans les bras. A chaque fois, la même question désespérée : « Pouvez-vous nous aider ? » Et lui, Romney, apparaissant alors en sauveur, en héros, répond : « Oui… »

Ces sont des exemples très imagés, très visuels, et qui se veulent extrêmement poignants. Tous les éléments dramatiques sont réunis, son storytelling est parfaitement rôdé.

* * *Le débat est un combat. Et, de fait, celui qui attaque est généralement favorisé par rapport à celui qui doit se défendre. Mais d’un côté comme de l’autre, c’est aussi celui qui s’est le mieux préparé qui a le plus de chance de l’emporter.

Il en ressort un Romney jugé grand vainqueur du débat, face à un Obama affaibli, bien moins « dans le coup » que d’habitude…

* * *Deux autres débats auront lieu avant le jour de l’élection le 6 novembre 2012.

La suite le 16 octobre prochain !

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La « bombe » du Premier ministre israélien, ou l’art de parler aux yeux avec un simple dessin

Jeudi 27 septembre 2012 le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahouprononçait un discours à l’ONU, appelant à stopper le programme nucléaire iranien :

Plus exactement, il demandait qu’une « ligne rouge » soit fixée, afin d’em- pêcher l’Iran de la dépasser.

Selon Netanyahou, « L’Iran est actuellement à 70% de son programme, la première phase est terminée et la seconde est déjà entamée. Au rythme actuel, l’Iran entrera à l’été prochain dans la phase finale ». Et si le programme nucléaire iranien dépasse les 90% de son achèvement, toujours selon Netanyahou, il ne sera plus possible d’y mettre un terme : « La question n’est pas de savoir quand l’Iran sera capable de construire une bombe, mais quand nous ne serons plus capables de l’arrêter. »

Il répète à plusieurs reprises l’expression « ligne rouge, claire » : « Il n’y a qu’une seule manière d’empêcher l’Iran de se doter de l’arme atomique, et c’est en fixant une ligne rouge, claire… Face à une ligne rouge claire, l’Iran cédera… Les lignes rouges ne conduisent pas à la guerre, les lignes rouges empêchent les guerres… Des lignes rouges auraient pu empêcher la première guerre du Golfe. Des lignes rouges auraient pu empêcher la Seconde Guerre mondiale… »

Mais il ne se contente pas de marteler ces mots. Pour se faire véritablement entendre et attirer tous les regards, il va « parler aux yeux »…

Parler aux yeux, cela consiste à quitter le registre purement verbal du discours, et introduire une véritable image, un schéma, un dessin, ou tout autre élément visuel permettant d’illustrer son propos.

Lors d’une prise de parole en public, un schéma permet de rendre visible et donc concret quelque chose d’abstrait. En cela, il rend le propos du discours plus facile à mémoriser : on retient plus facilement les images, que les mots qui y sont associés.

Ainsi, en sortant un large panneau sur lequel était dessinée une bombe avec une mèche allumée, Netanyahou était sûr de créer l’évènement et de faire parler.

La bombe est sur le point d’exploser, ce qui vise à alerter, à symboliser un danger imminent, à montrer l’urgence. La bombe représente également les différentes étapes de progression du programme nucléaire iranien, la première à 70%, la seconde à 90%. Quant à la ligne rouge, c’est le Premier ministre d’Israël lui-même qui la trace, dégainant un gros feutre et insistant sur cette limite fatidique avant le stade final, irréversible, appuyant le trait et repassant dessus plusieurs fois.

En dessinant la « ligne rouge », il la rend ainsi lui-même visible et claire, claire car visible. Il rend concrètes sa volonté et la possibilité d’agir.

L’effet de sa prestation tient donc a un impact visuel extrêmement fort.

Un dessin vaut mieux qu’un long discours. Son dessin, très simple, et même simpliste pour ne pas dire ridicule, se substitue aux habituels discours complexes et techniques sur le nucléaire. Et tandis que, selon l’adage, certaines paroles « s’envolent », son image au gros marqueur, elle, demeure indélébile

Certes, c’est moins le contenu du schéma que la représentation même de la bombe qui a vraiment fait parler pour l’instant. Son côté « cartoon » a eu deux effets : c’était pour Netanyahou le risque d’être décrédibilisé, par les détour- nements* dont il a alors fait l’objet (des montages photos le montre en personnages de BD ou de dessins animés, en mario bros, etc.), mais c’est aussi ce qui, du coup, a créé un véritable buzz sur internet, lui offrant une large publicité.

L’image de Netanyahou a fait le tour de la planète, et donc, en même temps, son message. Au final, sa stratégie s’avère payante.

* Exemples de détournements qui ont circulé sur le web (cliquez pour agrandir) :

Netanyahou bombe cartoon

Netanyahou bombe cartoon

Netanyahou bombe cartoon

Netanyahou bombe cartoon

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